Des paysans ghanéens déplacés par une minière canadienne demandent justice

Nouvelles : Analyses

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Des fermiers sefwi
Des fermiers sefwi : ils organisent pour obtenir un dédommagement équitable pour les fermes détruites par une mine canadienne.

Fuyant le soleil de plomb d’Afrique de l’Ouest, nous nous installons à l’ombre généreuse d’un acacia. Nicholas Ennin et cinq autres planteurs de cacao racontent : « En 2004, ils sont venus. Ils ont détruit nos fermes pour faire place à une mine… » C’est le début d’une triste histoire, cousue de mensonges et marquée du sceau de l’exode, l’histoire de l’anéantissement d’une communauté du Ghana pour l’ouverture de la mine Chirano, exploitée par une entreprise canadienne.

Après avoir obtenu la concession des pouvoirs publics, Red Back Mines (aujourd’hui propriété de Kinross Gold de Toronto) a proposé une indemnisation de 2,50 cédis (près de 1,20 $ CAN) par cacaotier mûr, clamant haut et fort qu’il s’agissait d’une généreuse majoration de l’offre de 2,30 cédis par cacaotier approuvée par les autorités.

Lorsque la communauté a découvert que l’indemnisation approuvée par les autorités équivalait en fait au double de la « généreuse » majoration offerte par l’entreprise minière, elle a confronté le représentant de la compagnie. « Il a dit qu’il paierait plus si nous pouvions prouver que le taux public était plus élevé ». Bien que de nombreuses familles aient accepté le taux proposé par la compagnie, vingt-cinq autres ont insisté pour obtenir l’indemnisation approuvée par les autorités au titre de la destruction des cacaotiers, qui représentaient leur principale source de revenus.

Inter Pares et Third World Network-Afrique ont appuyé les paysans dans leur lutte pacifique pour un règlement juste.

Les paysans se sont vus contraints de traîner l’entreprise devant les tribunaux.

Après que celle-ci n’a pas tenu les engagements pris dans le cadre de deux ententes hors cour, le ministre ghanéen des Ressources naturelles l’a sommée de payer. Elle a refusé.

En 2012, dans un surprenant revirement au seul avantage de l’entreprise minière, le Conseil ghanéen de l’évaluation foncière a décidé que le nombre de cacaotiers décomptés par l’entreprise et accepté par les paysans était inexact. Neuf ans après la destruction des arbres pour faire place à la mine, le Conseil de l’évaluation foncière a prétendu que le nombre d’arbres décomptés et agréé par écrit, par l’entreprise et les paysans, avait été surévalué.

Tandis que l’entreprise minière semble approuver les calculs révisés, les paysans, indignés et découragés, ont le sentiment d’avoir été trahis. Depuis novembre 2012, ils attendent, pour sortir de l’impasse, que le Ministre réponde à leur demande en infirmant la soudaine décision du Conseil de l’évaluation foncière.

À l’heure actuelle, ils se retrouvent sans terre et sans argent pour en acquérir une autre. Désespérés, ils ont menacé de réoccuper les terres cédées, malgré les risques de répression violente. Ils sont inquiets de voir les jeunes, sans travail et sans avenir, commencer à voler pour se nourrir. Pour sa part, en 2011 seulement, Kinross Gold a engrangé plus de 200 millions de dollars de profit grâce à la mine Chirano.

Dans son rapport de 2011 sur la responsabilité sociale, Kinross Gold maintient que le taux inférieur proposé aux paysans est légitime. Les choses étant ce qu’elles sont, tant que le Ministre ne répondra pas aux paysans, Kinross Gold ne sera pas tenue de payer. En avril 2014, Kinross Gold n’avait toujours pas versé aux paysans une juste indemnisation.

Il suffit d’écouter Nicholas et ses voisins  raconter avec dignité les difficultés de cet épuisant combat pour comprendre que seuls une solution juste et un dédommagement équitable permettraient d’éviter l’aggravation des dommages subis par cette communauté éprouvée.

‘En 2004, ils sont venus. Ils ont détruit nos fermes pour faire place à une mine…’ En avril 2014, Kinross Gold n’avait toujours pas versé aux paysans une juste indemnisation.

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